Oh mort, réalité impénétrable !

Oh mort, qui es-tu : pour nous ou contre nous ?

Au moment où on t’attend le moins,

Te voilà plaquant ton sort, hier à tel et aujourd’hui à tel autre

Tu arrêtes le cours de la vie à ceux qu’on aurait aimé avoir pour un peu de temps encore.

Tu arrives sans pitié, sans prévenir et sans retard

Sans être invitée, désirée et attendue, tu arrives et t’imposes

Es-tu réellement contre nous ? Nous veux-tu vraiment du mal ?

Ou plutôt, tu es cette sœur avec qui nous avons besoin de nous réconcilier ?

Oui tu es insaisissable ô mort, invisible, mais toujours là

Tu te fais notre sœur, notre alliée, notre compagne

Tu es toujours là, même si on refuse parfois de l’admettre

Distrait par le courant de la vie…

Tu es notre sœur car tu nous permets de passer de l’autre côté

Où nous attendent nos ancêtres, la Très Sainte Vierge Marie

Avec toute la cohorte des enfants de Dieu

Ô sœur mort, merci même si parfois tu nous enlèves le sourire

Semant la panique de nous savoir sans ces personnes que nous aimions

Merci, car tu nous fais revenir à l’essentiel

Tu nous fais prendre conscience de notre finitude

Merci, car grâce à toi, nous réalisons que nous ne sommes que pèlerins sur cette terre

Que notre vie ici-bas n’est qu’un passage, une préparation à l’éternité

Oui, tu es celle qui réussit à nous arrêter de la course frénétique à l’éphémère

Ô sœur mort, je voudrais tellement t’avoir présente à l’esprit

Faire de toi une réelle sœur, une compagne, une vraie amie

Oui ! apprendre à vivre avec toi, libère et nous fait rester humble

Que penser à toi ne suscite en moi ni frayeur, ni terreur

Ni tourment, ni agitation, ni peur, ni désolation

Puis-je aller à ta rencontre comme à celle d’une sœur

Confiante que tu me sers de pont pour passer à la vraie Vie

            Sr M. Pélagie Tioua YINA, le 5 août 2024 (J’ai mis ici dans ces mots les sentiments et la réflexion suscités par le rappel à Dieu le 4 août 2024 de Mgr Nicodème BARRIGAH, Archevêque de Lomé. Seigneur, accueille auprès de Toi celui qui t’a servi avec autant d’amour, qu’il repose en paix, AMEN !)

Mgr a eu une vie certes courte, mais très riche. Pendant que la douleur étrangle notre cœur, ne nous laissons pas submergés par le désespoir ; levons plutôt la tête et regardons derrière : que nous enseigne la vie de cet homme ? Que nous reste-t-il de lui ? qu’est-ce qui de sa vie peut édifier la nôtre, nous rapprochant davantage de Dieu ? Voilà pour moi, ce qui est essentiel en ce moment.

Car, « nul ne peut racheter son frère ni payer à Dieu sa rançon : aussi cher qu’il puisse payer, toute vie doit finir. Vous voyez les sages mourir : comme le fou et l’insensé ils périssent, laissant à d’autres leur fortune » (Psaume 48,8-9,11).

Quelle fortune nous a-t-il laissé, cet homme aux multiples talents ; ce serviteur de Dieu ?

Loin de donner un témoignage, l’objectif de ces quelques lignes est celui de susciter une réflexion qui puisse nous aider à passer de l’émotion, du choc, suscités per l’annonce de sa mort, à l’honneur de sa mémoire. Cette mémoire, selon moi, consisterait à retracer en méditant les enseignements, les écrits, les chansons, les actions de Monseigneur, pour les laisser prendre petit à petit acte dans notre vie.

Depuis l’annonce de la nouvelle bouleversante, je vois sur les réseaux sociaux, pas mal d’informations édifiantes sur ce serviteur infatigable. Que m’enseignent toutes ces informations sur sa vie ?

Comme acteur comédien, il nous dit de laisser libre-court l’imagination de l’enfant qui est en nous et que nous sommes encore quelquefois. Mais derrière chaque scène de comédie, nous pouvons recueillir une leçon pour notre vie.

Comme artiste compositeur chanteur, ne nous dit-il pas de laisser parler notre âme, de laisser déborder la voix de l’Esprit-Saint ? A travers ses chansons, Monseigneur a partagé au monde entier son intimité avec le Seigneur, sa foi, sa confiance en Lui, son amour pour Lui, sa soif de Lui, ses joies, ses espérances, ses peines, … bref, il nous introduit dans cette intimité.

Comme musicien, il a encore et aura toujours un pouvoir apaisant et relaxant sur nous. En partageant sa passion, il a pu et il peut toujours aider les autres à gérer le stress et à améliorer leur bien-être émotionnel ; car comme nous le savons, la musique a d’énormes bienfaits sur notre cerveau et notre être tout entier. En tant que musicien, ce serviteur de Dieu peut nous encourager à dépasser nos limites dans tout apprentissage et à croire en nos capacités. En effet, apprendre de la musique, n’est pas chose facile.

Comme juriste, nous pouvons apprendre de Monseigneur, comment rechercher la vérité et l’affirmer tout en respectant les autres, même avec qui l’on ne partage pas la vision des choses. J’ose dire qu’il a expérimenté dans sa peau cette parole de Dieu : « Heureux les persécutés pour la justice, car le royaume des cieux est à eux » (Mt.5,10).

Comme diplomate, il peut nous servir d’exemple dans des situations de tensions. Ceux qui l’ont côtoyé pourraient peut-être témoigner de sa délicatesse, de sa disponibilité, de son respect pour toute personne, de son professionnalisme, mais en même temps de cette fermeté et persévérance dans la recherche des voies et moyens pour rétablir la vérité, la paix, la concorde. Il a certainement dû faire sienne cette parole de Dieu : « Heureux les artisans de paix, ils seront appelés fils de Dieu » (Mt.5,9). Nous ne sommes pas diplomates, certes, mais nous pouvons nous inspirer de lui et pourquoi pas, invoquer son intercession dans des situations de conflit.

Comme écrivain et à travers ses écrits, Mr Anani nous aide à grandir, à nous épanouir, à mieux comprendre le monde qui nous entoure ; ne disait-il pas lui-même, « Plus on connaît, plus on est tolérant et moins on connaît, plus on tend vers l’extrémisme ». En partageant des histoires, ses idées, ses émotions, il nous offre un réel cadeau. Il nous informe, nous édifie, suscite une empathie et stimule notre imagination. A travers ses pièces théâtrales, ses anecdotes il nous divertit tout en nous enseignant.

Comme intellectuel, cet homme de Dieu nous fait comprendre que la connaissance, loin d’être un objet d’orgueil, est une richesse à mettre au service des autres. Nous pouvons apprendre de lui que quel que soit notre niveau d’études, nos diplômes, nous pouvons encore rester sobres, simples et accessibles. Comme intellectuel, Monseigneur nous apprend le sens de responsabilité par rapport à ce que nous avons reçu et la soif de continuer à apprendre, à chercher réfutant ainsi la suffisance.

Comme prêtre, Père Nicodème peut nous enseigner que servir, c’est régner et qu’aimer, c’est servir. Il a certainement expérimenté le sacerdoce comme service. Peut-il encore être une lumière sur le chemin de tous les prêtres du Togo et du monde. En tant que prêtre, il se battait pour se faire le cœur, la voix et les mains de Dieu. Sa ferveur et la profondeur de ses homélies montraient sa soif d’attirer les âmes au Christ.

Comme évêque et accueillant la plénitude du sacerdoce, il l’a davantage vécu dans un service total et humble. Comme pasteur, il a enseigné, guidé, soutenu, donné l’exemple ; il a été avec et pour son peuple. Nous pouvons deviner à quel point il aimait l’église et les affaires du royaume en écoutant ses enseignements. Comme pasteur, Monseigneur se laissait touché par la misère de son troupeau.

Comme chrétien, enfant de Dieu, nous pouvons apprendre de Monseigneur sa joie d’être chrétien et cette confiance filiale qu’il avait en Dieu. Autant il était fier de l’être, autant il avait compris la responsabilité qui en découlait ; d’où ses appels incessants à vivre et témoigner de notre foi et notre appartenance à Jésus-Christ.

Comme un être humain, toute personne, quel que soit son bord aurait pu être touchée par sa simplicité, sa sensibilité, sa candeur, sa pudeur, son éloquence, son cœur et son esprit ouverts et accueillants, sa sociabilité, sa rigueur dans le travail, son grand sens d’humour, sa patience, sa douceur, sa générosité, son amour du travail bien fait, son sens d’écoute, ses capacités de communication.

Comme une personne portant une grande maladie, il nous apprend la souffrance dans le silence désirant toujours offrir de la joie en dépit de tout. Dans cette épreuve encore, il continuait à nous enseigner l’endurance, la persévérance dans le bien, la foi dans l’épreuve et l’abandon à la volonté de Dieu.

Faut-il des choses extraordinaires pour être saint ? Dans mon cœur, Mgr Barrigah-Bénissan est un saint. Priez ! prions et invoquons son intercession pour les différentes situations de notre vie de foi !

Seigneur mon Dieu, comment ne pas te rendre grâce pour autant de richesses dont Tu as comblé, ton fils et serviteur ! Merci pour l’immense générosité dont il a débordé montrant à ses frères et sœurs combien est grand ton amour pour l’homme. Soit loué pour ce cadeau au peuple togolais, à l’Eglise entière et au monde. Maintenant qu’il est auprès de Toi, écoute-le en notre faveur !

Mgr Barrigah-Bénissan, priez pour nous ! 

Le 6 août 2024, Sr M. Pélagie Tioua YINA (Sœurs de Sainte Catherine d’Alexandrie)

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